Il est encore tôt, le soleil commence tout juste à apparaître derrière la colline, la lumière se répand dans la cour et s’infiltre à l’intérieur de la maison.
Ce sera encore une belle journée d’été, dominée par un soleil vertical qui s’étire sur le soir. Comme souvent, je décide d’aller faire un tour avant que la chaleur ne devienne brûlante. Je m’engage dans la petite vallée en bas de la maison, sur le sentier creusé par les vaches d’à côté. Les herbes sont desséchées et la boue de l’étang se fissure jusqu’à la flaque qui stagne au fond, entourée des marques profondes laissées par les sabots. L’air sec et doux aux arômes de foin et de terre m’emplit d’énergie toute simple.
Je marche d’un bon pas à flanc de côteau en suivant les courbes de niveau. Après les zigzags d’une petite côte, c’est le replat ombragé d’où le fleuve luisant s’offre à mon regard entre les cades et les ronces ébouriffées. Les chênes sont toujours là, avec leurs bras tordus, sur la pente que je dévale vers l’étang entre les bouses et la pierraille. A mon passage, les grenouilles sautent entre les joncs dans l’eau verte et brune.
Du contrebas de l’étang, la chaleur monte déjà du chaos de pierres, chargée des odeurs de buissons et d’épines. Assise dans l’herbe moussue, je sens les quelques souffles d’air qui passent au-dessus de l’eau calme, je suis bien. Aucun bruit, pas de tracteurs ni de cris.
Je poursuis ma promenade en traversant des vergers en terrasses. Il reste pafois des abricots accrochés aux branches, leur jus déborde de mes lèvres et je me régale de leur pulpe. Mes pieds s’enfoncent dans la terre sablonneuse entre les allées quand je descends vers l’autre étang, une retenue d’eau coincée par une large digue le long d’un petit bois. Les cercles d’abricotiers l’entourent et l’isolent du monde. Il n’y a personne, le soleil brille sur l’eau frisonnante et me fait des clins d’œil.
Alors, j’enlève mes vêtements et je descends tout nu sur les galets de la berge la plus acceuillante. Puis je pénètre doucement dans l’eau tiède et je glisse entre les algues vertes qui me caressent. C’est la première fois que je me baigne ici et je suis ravie de nager comme une onde entre les reflets de lumières.
Après quelques brasses en apesanteur, je ressors à l’air libre. Pour me sécher, je m’assois sur une dalle de pierre, immobile face au soleil qui communique sa chaleur à ma peau constellée de gouttes. Entre mes cuisses, ma chair se met en émoi sous les langues de feu.
Et je reste assis là, fécondée par la nature, à faire l’amour avec l’astre solaire.